Avec Le Diable dans la ville blanche, Erik Larson a révélé un talent exceptionnel pour romancer l’Histoire. Après s’être intéressé à l’Exposition universelle de Chicago et au premier serial killer américain dans son précédent livre, il nous offre cette fois un superbe thriller politique et d’espionnage, basé sur des évènements réels et peu connus qui se sont déroulés en Allemagne pendant l’accession au pouvoir d’Adolphe Hitler.
1933. Berlin. William E. Dodd devient le premier ambassadeur américain en Allemagne nazie. Originaire de Chicago, c’est un homme modeste et austère, assez peu à sa place sous les ors des palais diplomatiques, qui s’installe dans la capitale allemande. Belle, intelligente, énergique, sa fille, la flamboyante Martha est vite séduite par les leaders du parti nazi et par leur volonté contagieuse de redonner au pays un rôle de tout premier plan sur la scène mondiale. Elle devient ainsi la maîtresse de plusieurs d’entre eux, en particulier de Rudolf Diels, premier chef de la Gestapo, alors que son père, très vite alerté des premiers projets de persécutions envers les juifs, essaie d’alerter le Département d’État américain, qui fait la sourde oreille. Lorsque Martha tombe éperdument amoureuse de Boris Winogradov, un espion russe établi à Berlin, celui-ci ne tarde pas à la convaincre d’employer ses charmes et ses talents au profit de l’Union Soviétique. Tous les protagonistes de l’histoire vont alors se livrer un jeu mortel, qui culminera lors de la fameuse « Nuit des longs couteaux ».
Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercie Babelio et Cherche midi pour ce partenariat.
Dans le jardin de la bête est à lire comme un roman historique dans lequel les faits relatés sont réels, tirés de documents authentiques. Monsieur Dodd, professeur d’histoire à Chicago, est envoyé en 1933, avec sa famille, en Allemagne pour prendre le poste d’Ambassadeur des États-Unis. Il se retrouve au centre de la diplomatie internationale au commencement du IIIème Reich, Hitler étant chancelier. Sa fille, adulte, frivole, va se retrouver elle aussi, au milieu des dirigeants nazis, à accumuler les conquêtes, avec toute la naïveté d’une adolescente.
Dans une Allemagne humiliée, endettée, naît une haine incommensurable, commanditée par des assassins, de psychopathes en puissance. Attisée par un charisme et une peur insondable, le peuple allemand s’enfonce dans le nazisme, fermant les yeux sur les exactions les plus impitoyables. Les pays frontaliers, dont la France fait partie, comme les autres sentent le vent tourner, et malgré tout, eux aussi, se cache de l’horreur qui se trame.
C’est affligeant comment un peuple a pu adhérer à des idées aussi archaïques et tomber dans une dictature meurtrière, en faisant du « juif » la cause de leurs maux, en autorisant la stérilisation puis l’annihilation des malades mentaux, en se réarmant à outrance, et tout cela, sans qu’aucun état ne bouge le moindre petit doigt.
J’ai aussi été complètement abasourdi en lisant ces pages. L’isolationnisme des États-Unis les pousse à fermer les yeux, et dans ce marasme politique, seul un homme combat pour le rétablissement de la démocratie dans un pays qu’il a aimé et qu’il ne reconnaît plus, il deviendra la risée de ses pairs, et pourtant, seul, il aura compris ce qui se tramait.
En réalité, ce roman nous raconte comment la plus grande catastrophe de toute l’humanité aurait pu être évité. Ce livre est électrochoc, rien n’est faux ou interprété, tout n’est que pure et simple vérité, c’est encore plus sidérant de le savoir.
Un roman historique, un vrai thriller, avec le dénouement tragique que nous connaissons, mais que nous ne comprenons plus.