Quelqu’un à qui parler – Cyril Massarotto

Samuel est seul le soir de son anniversaire. Il n’a pas de femme, encore moins d’enfants, pas d’amis. Son métier l’ennuie et son patron est un psychopathe. Ce soir là il boit, il appelle son ex, son ex de dix ans qui a refait sa vie. Puis il se remémore des instants de sa jeunesse, et comme ça il numérote un vieux numéro de téléphone, celui de maison de quand il était petit. Un enfant répond, il s’appelle aussi Samuel.

Le récit c’est le face à face d’un petit garçon plein d’enthousiasme et d’un adulte dépassé par la vie, anesthésié par son propre quotidien. Un petit plein de rêve face à un adulte ensuqué. C’est un homme seul qui au plus profond de lui-même refait surgir l’état d’esprit dans lequel il était à dix ans pour faire un bilan sur sa vie, ses choix.

L’auteur a un style d’une grande fluidité. Pour avoir déjà plusieurs de ses romans, il y a un travail qui malgré une histoire un peu pauvre, vous pousse à avancer. C’est léger et très fluide. Le roman se lit avec une grande facilité, c’est presque simple de lire cet auteur.

Mais ce style ne suffit pas, le récit est pauvre comme déjà dit plus haut. C’est mielleux, et tout est bien qui finit bien, c’est même agaçant.

C’est le premier roman de cet auteur qui me déçoit. Dommage…

Quatrième de couverture Samuel fête ses trente-cinq ans, seul face à des assiettes vides. La déprime est proche. Il attrape alors son téléphone mais réalise qu’il n’a personne à qui parler. Soudain, un numéro lui revient en mémoire : celui de son enfance et de la maison du bonheur familial depuis trop longtemps disparu.

Tiens, et s’il appelait ? À sa grande surprise, quelqu’un décroche. Et pas n’importe qui : c’est à lui-même, âgé de dix ans, qu’il est en train de parler ! Mais que dire à l’enfant que l’on était vingt-cinq ans plus tôt ?

Finalement, chaque soir, à travers ce téléphone, Samuel va s’interroger : l’enfant que j’étais serait-il fier de ma vie ? Aurait-il vraiment envie de devenir l’adulte que je suis aujourd’hui ? Ne l’ai-je pas trahi en renonçant à mes rêves ?

Grâce à ce dialogue inattendu et inespéré, Samuel va, peu à peu, devenir acteur de sa vie. Et avancer, enfin !

#BalanceGenève – Sandra Mamboury

Ce roman est une suite de d’anecdotes de la vie de Clémentine Pinson, journaliste un peu ratée, sans le sous, et sans travail aussi. Chaque petit chapitre qui se déroule dans l’ordre chronologique de sa vie pendant une petite période, nous raconte les déboires de cette journaliste maudite, qui vit, travaille et respire Genève.

D’une écriture très fluide, très agréable même à lire, le roman se veut comique, avec des traits d’humour sur un peu tout. Au point que l’auteur semble un peu s’égarer et ne pas aller au bout des choses. On début souvent sur un cliché un peu rapide, de comptoir et on finit rapidement dans le flan, on sent un début d’étincelle, puis le soufflé perd de sa hauteur. C’est décevant.

Ce que je souhaite, c’est que l’auteur n’a pas essayé de s’autobiographier, parce que sinon, c’est assez pathétique. Espérons que ce personnage qui essaye de voler de ses propres ailes, mais qui à chaque fois comme un poussin se casse la gueule n’est qu’une pure fiction.

Je remercie Babelio et Slatkine qui publie des romans bien meilleurs que celui-ci.

Quatrième de couverture Correspondante d’Info-Matin pendant une année à Paris, Clémentine Pinson revient à Genève en pleine tourmente de la presse écrite. Son quotidien cesse de paraître, elle tente de survivre comme journaliste indépendante. Sans refuser les petits boulots et les paris audacieux dans une ville où elle multiplie les rencontres insolites et improbables.

La librairie de la place aux Herbes – Eric de Kermel

Ce roman assez léger se déroule dans le sud de la France, à Uzès, dans le Gard. Une professeure quitte son métier pour reprendre une librairie dans la petite ville d’Uzès. Au gré des saisons, elle nous raconte des tranches de vie, celles des vies qu’elle va croiser, ces personnes qui vont venir chercher un livre, apporter une histoire, repartir le coeur plus léger. Certains des personnages sont touchants, comme ce Tarik, militaire, qui a perdu la vue pendant une mission. En revanche, le roman est une succession de clichés sur les réflexion de Nathalie, cette libraire venant de Paris. Parfois, même, elle s’enfonce dans sa propre bétise, s’autosatisfaisant de ces pseudos petits miracles qu’elle ose imagine avoir contribuer à leur réalisation. L’écriture est fluide, légère, sans accroche, mais le roman est un ramassis puritain de bonnes pensées pour finalement se rendre compte qu’elle vit séparée cinq jours sur sept de son mari qui continue à bosser à Paris, fumant cigarettes sur cigarettes et à deux doigts de crever. Heureusement que l’auteur nous parsème, nous étale sa culture littéraire plutôt, j’ai retenu quelques romans cités que je lirais bien.

Quatrième de couverture La libraire de la place aux herbes est un voyage initiatique au pays des livres. Passez la porte de la librairie de la place aux herbes et laissez-vous envoûter par les parcours de vie des clients de Nathalie. Tendres, drôles ou tragiques, la libraire d’Uzès vous raconte ces histoires en même temps que la sienne et vous conseille ses coups de coeur littéraires.

Demain j’arrête ! – Gilles Legardinier

demainjarreteComme tout le monde, Julie a fait beaucoup de trucs stupides. Elle pourrait raconter la fois où elle a enfilé un pull en dévalant des escaliers, celle où elle a tenté de réparer une prise électrique en tenant les fils entre ses dents, ou encore son obsession pour le nouveau voisin qu’elle n’a pourtant jamais vu, obsession qui lui a valu de se coincer la main dans sa boîte aux lettres en espionnant un mystérieux courrier… Mais tout cela n’est rien, absolument rien, à côté des choses insensées qu’elle va tenter pour approcher cet homme dont elle veut désormais percer le secret. Poussée par une inventivité débridée, à la fois intriguée et attirée par cet inconnu à côté duquel elle vit mais dont elle ignore tout, Julie va prendre des risques toujours plus délirants, jusqu’à pouvoir enfin trouver la réponse à cette question qui révèle tellement : pour qui avons-nous fait le truc le plus idiot de notre vie ?
 
Ce roman est un roman destiné à un public féminin principalement. On y découvre une Julie, presque la trentaine, vivant seule, entourée d’amis, et qui tombe amoureuse de son voisin. Elle va imaginer tous les scénarios possible à partir de détails totalement insignifiants. Son esprit tortueux va la mener à changer de métier et devenir une usurpatrice d’identité, uniquement dans le but de plaire et de créer une relation avec Ric, le voisin.
Avant de commencer ce roman, j’avais lu quelques critiques faisant état d’un auteur masculin ayant découvert le Graal au point que quelques lectrices doutaient réellement de la véracité de la biographie de l’auteur – ce n’est pas possible, un homme n’aurait pas pu écrire ça. Ce Graal, c’est tout simplement la compréhension de l’esprit et de l’intellectuel féminin. Le labyrinthe émotionnel des femmes serait retranscrit dans ces pages. En lisant ce roman, en effet, le personnage principal adopte réellement des comportements et des pensées alambiquées pour arriver à découvrir une vérité qui est tout sauf celles qu’elle a pu s’imaginer. Si l’esprit des femmes est aussi tordu, ça fait peur et je suis assez fier alors d’être un homme, et le terme obsession gagne tout son sens lorsqu’il s’agit du relevé de détails pour arriver à créer une histoire derrière… bon passons. Pour ma part, le personnage principal m’a paru complétement décalé et parfois bizarre, et même si l’auteur a pu comprendre ce fonctionnement, l’humour, lui, est typiquement masculin. Vous ne trouverez jamais, mais j’ai bien dit jamais, ou plutôt écrit jamais, mais jamais, de jeté de tête en arrière suivi d’un rire vengeur, dans un roman écrit par une femme.
Même si l’écriture est fluide et facile à lire, l’histoire tend à s’enliser trop souvent avant de repartir à nouveau. C’est assez fatigant à la fin, car l’auteur a tendance à s’embourber de temps à autre. L’histoire, quant à elle, bien que déroutante par l’imagination débordante du personnage, est assez prévisible et tout est bien qui finit bien d’ailleurs. Rien de méchant ni de fantastique, c’est même un peu enfantin. On retiendra la morale de l’histoire qui est bien plus profonde et que l’auteur nous fait ressentir en quelques lignes seulement dans ces remerciements. Oups, au moins je vous aurait épargné la lecture du roman en allant directement lire les trois dernières pages.
En somme, beaucoup de tapage pour pas grand chose.

Colère du présent – Jean-Bernard Pouy

coleredupresentDepuis la fin du Moyen-Age, le Festival Colères du présent réunit tous ceux qui sont énervés, fâchés, ou en colère. C’est fait d’expression populaire mâtinée de critique sociale. C’est à Arras, tous les ans, même heure, même endroit.

Et cette année-là, ça dérape…

Bon anniversaire !

Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercier Libfly et Baleine pour ce partenariat.
Arras, ville du Nord, aujourd’hui, 1er mai. Suite à un groupement de socialistes-anarchistes-marginaux totalement pacifistes, le festival dégénère. Ils décident de prendre en otage la ville pour en faire la première ville libre. L’armée arrive sur les lieux, les négociations peuvent commencer.
Le sujet est sérieux, mais la forme prise par l’auteur est comique. Dans les pensées du Général qui est aux commandes de l’unité en place, nous sommes face à un homme rigide d’apparence qui détend l’atmosphère à coup de blagues graveleuses. L’humour est de mise dans ce roman aux accents de critiques. La critique est là en effet, mais de quel côté. L’armée, qui sous son aspect rugueux, nous propose des personnages haut en couleur, taciturne mais jovial. Les résistants, qui sous leur aspect fêtard, s’organisent d’une manière très militarisée pour créer une liberté utopique. Doivent-ils en passer par les armes pour être libre, être policé pour choisir ?
L’écriture est rapide et présente une fluidité de lecture intéressante. Les phrases assassines, comiques, fusent à tout bout de champ faisant de ce récit un vrai moment de plaisir de lecture malgré le sujet un peu épineux.
Je remercie Libfly et Baleine pour ce partenariat.
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En cas de bonheur – David Foenkinos

encasdebonheur » Personne ne savait que faire en cas de bonheur. On avait des assurances pour la mort, pour la voiture, et pour la mort en voiture. Mais qui nous protégera du bonheur ? Jean-Jacques venait de comprendre que ce bonheur, en devenant si fort, était la pire chose qui pût lui arriver. « 

Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercier Livraddict et J’ai lu pour ce partenariat.

Ce roman de David Foenkinos traite de la relation amoureuse dans un couple. Ce couple, c’est Claire et Jean-Jacques. La routine s’installe, les efforts des premiers instants son aujourd’hui inexistants. C’est un couple qui vieillit comme beaucoup de couples. Jean-Jacques, persuadé que sa femme a des aventures, décide de reconquérir sa vie amoureuse, un peu laissée à l’écart par ses années de couple. Claire est dans le doute et le fait suivre par un détective privé. Elle apprend la tromperie et le quitte.

Le thème est assez basique, sans originalité, jusqu’aux prénoms des personnages. Ce n’est pas de ce que ce roman traite mais plutôt la manière dont il le traite qui est intéressant. La sensation qui s’en dégage à la lecture est la même que si vous regardiez une émission télévisée : un couple qui s’ennuie, se trompe, se quitte et se remet ensemble, emmenant tout sur son passage. L’auteur traite de l’évolution des sentiments de ce couple en perdition, des proches qui les entourent et qui payent les pots cassés. Parce que finalement, le grand vainqueur, c’est l’amour, celui que l’on ne voit pas, qui se fait par de petits efforts au quotidien. Mais à vouloir savoir si l’herbe est plus verte chez le voisin, on risque d’en perdre sa maison.

L’écriture est légère, le roman se lit facilement et assez rapidement. Ce roman offre une petite bouffée d’oxygène et de légèreté, comme une plume dans un souffle d’air.

Je remercie Livraddict et J’ai lu pour ce partenariat.

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Le café d’Yllka – Cécile Oumhani

cafeyllkaUne femme croisée dans un aéroport et l’ombre d’une tragédie logée au fond de ses yeux… Malgré moi, je la suivis du regard, rien que pour savoir où elle allait, comme si cela me donnerait le secret du chagrin qu’elle emportait avec elle. Pristina… Sarajevo… Puis elle s’est dirigée vers un long couloir vitré. Je n’ai pas pu voir vers laquelle de ces deux villes elle se rendait. Je ne le saurai jamais. Il me restait l’écho terrible dont l’Histoire récente avait chargé ces deux noms. Pristina… Sarajevo…
«L’aéroport de Budapest disparaît dans la brume. Emina quitte l’avion posé sur la piste. Plus rien ne la sépare du passé qui roule, gronde, mugit là-bas dans sa mémoire. Car c’est le passé qu’elle foule maintenant, le cœur au bord des lèvres, avant de s’envoler vers l’autre ville, plus loin vers le sud. Le monde bascule d’un seul coup.»

Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercier Libfly et Elyzad pour ce partenariat.

Mais qui est cette femme croisée dans un aéroport par Cécile Oumhani avec dans son regard, ses gestes, un tragédie enfouie au plus profond d’elle-même ? Emina revient dans son pays, quelques années plus tard. Sa patrie, la Yougoslavie, sa religion, musulmane, son enfance, la guerre. La fuite et la séparation ponctuent ces mois de combats vécus dans cette région avant de la quitter définitivement en train. Elle revient pour essayer de retrouver la trace de sa mère Yllka, qui l’a éloignée avec son petit frère des violences de cette tragédie et son père, parti une arme à la main pour les défendre.

Ce court roman, qui se lit d’une traite, est non pas le témoignage d’une seule personne, mais celui de tout un peuple, qui aura subit les horreurs d’une guerre inutile. Dans ce récit plein de poésie se trouve la souffrance infinie, irréparable, insondable de la perte d’un proche. Cette fille qui revient veut savoir, renouer avec une histoire que plus personne ne connaît, beaucoup tentent d’oublier, peu s’en souviennent, et les autres… sont morts. L’écriture, magnifique, presque lyrique, ajoute du poids à la douleur de la survivante. Au fur et à mesure, elle comprend qu’elle ne reverra pas sa mère, mais elle cherche à vivre ses derniers instants. Par une seule fois, il n’est question de « pourquoi ». Elle accepte, alors qu’elle n’est qu’une enfant, la guerre. Elle refuse, par contre, le « comment ». Comment son père et sa mère auront disparu ?

L’auteur nous propose ici un récit profond, difficile, sans haine, et plein d ‘espoir, et manie la plume d’une très belle manière pour un témoignage poignant. Ces enfants des années 90 se trouvent au centre d’une équation, devenu adulte aujourd’hui, ils essayent de vivre avec un facteur inconnu, ce que sont devenus leurs parents, ils ont perdu leurs racines et tentent de construire leur avenir avec ce chaînon manquant.

Ce roman se découvre dans la collection Éclats de vie.

Je remercie Libfly et Elyzad pour ce partenariat.

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Une vie après l’autre ou l’incarnation des possibles – Frankie Ventana

unevieapreslautreD’incidences en coïncidences se forgent d’improbables destins : celui de Gabrielle aura été de rencontrer, un soir de décembre 1982, Lila von Haffen, pianiste classique adulée. Leurs existences vont s’imbriquer en dépit de l’empreinte que nulle gloire, nul génie, nul talent n’effacera. De cette étrange nuit où chacune se trouve dans l’attente d’un événement indéfini, la première va s’enfermer dans sa destinée tandis que la seconde s’en délivrera par le suicide. Vingt ans plus tard, Gabrielle entre en possession d’une correspondance signée de la main de la virtuose. Elle se lance alors sur ses traces, à travers l’Europe jusqu’en Argentine.
Ce voyage la conduira à accepter son destin cristallisé en la personne de Lila von Haffen…

Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercie les Editions Kyklos pour ce partenariat.

Gabrielle était voué à devenir une grande pianiste, mais sa rencontre avec Lila Von Haffen il y a plus de vingt ans, la musicienne en vogue à cette période, change la donne. Elle arrête la musique, se marie, divorce, et finalement passe à côtés de la vie, jusqu’à la réception de lettres de Lila, disparue tragiquement à la même période.

Le roman retrace donc la quête de Gabrielle à la recherche de la vérité sur la disparition de Lila. Cette aventure qui l’a fait voyagé à travers l’Europe, est un trajet vers sa reconstruction intime, une reprise en main de sa vie. Tous les personnages qu’elle rencontre vont être un levier, à leur manière, pour l’aider dans sa quête. Gabrielle, perdue psychologiquement, peut-être déprimée, marquée profondément dans sa tête et son cœur, tente donc de refaire surface, inconsciemment, grâce à l’espoir de retrouver Lila.

Le personnage est attachant et réaliste. Ses rencontres nous font découvrir le monde qui gravitaient autour de l’artiste avant sa disparition. Pour ma part, Marylou sera le déclencheur, une femme qui vit dans son camion, possède une grande philosophie de la vie, et qui est totalement étrangère à son désarroi.

Ce roman est court. L’écriture est très fluide, belle et travaillée. Narré au présent, il est alors aisé de discerner les souvenirs des actes d’aujourd’hui. Une histoire avec en arrière plan la musique classique, Chopin et le piano, l’obstination et la passion, la perfection et l’abnégation. Un roman sur la vie et la quête du bonheur.

Je remercie les Editions Kyklos pour ce partenariat.

Kyblos

Les années d’innocence – Frankie Ventana

anneesinnocenceIls sont trois amis d’enfance. Trois artistes qui posent un regard farouche sur la vie. Trente ans d’amitié et un ultime rendez-vous à Amsterdam qui les cueille au moment le plus fragile de leur existence.

L’auteur nous livre ses interrogations pêle-mêle sur l’amour, les choix que l’on s’impose, l’expérience de vie et de mort, les souvenirs et la culpabilité qui va avec…

Ce récit, s’il révèle les émotions obscurcies d’une génération consciente de son éclatement, demeure avant tout un hymne à la vie que nous soyons combattants acharnés ou simples observateurs…

Avant de commencer cette chronique, je tiens à remercier les Editions Kyklos pour ce partenariat.

Les années d’innocence est un court roman. Trois amis, trente ans d’amitié, de coups et d’amour. Un trente-et-un décembre au crépuscule d’une vie, à l’aube d’une déchirure. Paul est homosexuel, malade du sida, il est épuisé et cette nuit, il prend une décision, grave et irréversible.

Frankie Ventana, comme dans son autre roman que j’ai lu très récemment, possède une belle écriture, travaillée. La narration se fait à la première personne, celle d’une femme, utilise le présent, facilitant la résurgence de souvenirs au passé. Elle accorde énormément de place aux sentiments, imprégnant le lecteur de l’état d’esprit. Loin du physique et de l’apparence des personnages, elle nous place en eux, à sentir et ressentir comme eux. C’est l’atout principal de l’auteur, ce moment de solitude propre au personnage principal perdu avec lui-même, névrosé, atteint psychologiquement, abîmé par la vie, et traçant droit devant, allant toujours de l’avant, avec comme seul consigne, avancer. C’est parfois un peu cru, direct, et incisif, mais c’est profond, la douleur sourde de la vie ressort comme un geyser de ses personnages. Ce roman, qui se lit rapidement, raconte la mort qui s’installe, au début invisible, qui fait peur, et finalement qui est acceptée, l’amitié qui détruit et pourtant si indispensable. Les années d’innocence est un roman juste, vague et précis à la fois, un beau roman, qui se lit avec beaucoup de plaisir.

Je remercie les Editions Kyklos pour ce partenariat.

Kyblos

Dans la vie – Aïssa Lacheb

danslavieIl y a d’abord un homme solitaire devenu assassin par rectitude humaine. Puis le quotidien d’un infirmier dans un mouroir ordinaire, révolté par les souffrances muettes qui y sont infligées et les destins qui s’y brisent. Le roman s’achève quand toutes ces vies souterraines se rencontrent et se révèlent, sur un dernier récit retrouvé, le conte parallèle d’un témoin muet, qui clôt en forme de parabole un roman que l’on referme différent.

Avant de commencer cette critique, je tiens à remercier News Book et Au Diable Vauvert pour ce partenariat.

Dans la vie raconte le parcours d’un tueur en série. Dans la première partie de ce roman, il décide (il, parce qu’à aucun moment, nous n’apprenons son nom), un jour avant de partir définitivement, de solder ses comptes avec les personnes qui auront croisées sa vie. Pour l’un, c’est parce qu’il a empêché de rentrer en boîte de nuite, pour l’autre, c’est parce qu’elle l’aura fait virer de son travail pour un soi-disant harcèlement sexuel. Il note leurs noms sur une feuille, les recherche, et les élimine.

L’écriture de cette partie est la retranscription de ses pensées ou d’un entretien. Il écrit comme il parle et les négations sont tronquées, quelques phrases sont construites bizarrement. Cette manière d’écrire donne au texte une certaine authenticité mais me paraît gênante à la lecture.

Dans la deuxième partie, on le retrouve dans son travail. Il est infirmier. Toute la rancœur aperçut dans la première partie disparaît pour une humanité réelle et sincère pour les personnes dont il a la charge. Il travail dans un centre qui accueille des personnes malades et âgées.

Mais c’est affligeant de constater comme les personnes malades sont abandonnées. Comment, pour le seul prétexte administratif chronophage, peut-on arriver à délaisser des gens, des êtres humains, les ignorer, les considérer comme des animaux ?

Dans la vie raconte un infirmier qui tue et dans le même temps qui reste très humain. Qui assassine qui ? C’est peut-être la vraie question qu’il faut se poser. Est-ce lui, qui solde ses comptes, ou est-ce ce médecins, qui délivre une ordonnance sur le bord de la table, sans un regard pour son patient qui souffre, est-ce aussi ces infirmières, qui ne se préoccupent plus de leurs douleurs physiques et morales ? Ne sont-ils pas eux aussi des assassins par omission de ces délaissés de la société ? Cette deuxième partie nous raconte le calvaire de ces oubliés de la société qui se donne bonne conscience sous le voile de l’hypocrisie. Cette partie est longue, longue pour nous faire vivre cette souffrance quotidienne, cette persécution silencieuse qu’endurent les résidents maltraités, pour nous faire ressentir ce que c’est de vivre avec l’attente de la mort qui ne vient pas, avec ce corps qui ne répond plus, avec cette indifférence douloureuse.

La troisième et dernière partie est le récit d’une des pensionnaires. Une fiction avec une morale. Une histoire courte et intéressante.

Dans la vie est un roman qui ne laisse pas indifférent, qui force la réflexion. Un roman puissant, chargé d’émotions, un roman à lire.

Je remercie News Book et Au Diable Vauvert pour ce partenariat.

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